LUTTE DE CLASSE

(Article du Dauphiné Libéré du 13 mars 2000)

Elus, enseignants, parents d'élèves et élèves, quelques 500 personnes sont descendues hier matin dimanche dans les rues de Buis pour éviter la fermeture d'une classe...

 

 

 

 

 

 

Derrière le député et les 11 maires des communes concernées, la manifestation de dimanche rassemblait une foule importante, ici dans la rue du Centre...

 

Depuis que la nouvelle a été annoncée en conseil municipal par le maire voilà exactement 10 jours, on ne parle plus que de cela à Buis et dans les 11 communes environnantes. La nouvelle a fait l'effet d'une bombe : On touche à l'école ! On veut lui retirer une classe ! La menace bien réelle est consécutive à une baisse prévue d'effectif à la prochaine rentrée scolaire.

Une baisse que les enseignants et parents d'élèves estiment à une dizaine d'enfants sur 200 et qui cependant est jugée suffisante par l'administration pour prévoir la suppression d'une classe et réduire leur nombre de 8 à 7. Dés le 2 mars le conseil municipal unanime prenait une résolution de protestation et invitait la population à manifester son hostilité à cette mesure. Aussitôt, les parents d'élèves, de concert avec les enseignants unanimes, prenaient le relais. Pose d'affiches dans les rues et chez les commerçants, campagne de pétitions (qui recueillent plus de 600 signatures à ce jour), distributions de tracts et de messages par haut-parleurs, la mobilisation s'organisait et devait déboucher sur l'importante manifestation qui s'est déroulée hier dimanche en fin de matinée dans les rues du Buis.

Malgré un soleil éclatant et une température estivale c'est une foule estimée à quelques 500 personnes qui se retrouvaient devant l'Office du tourisme. Parmi celles-ci et qui prenaient la tête du défilé on reconnaissait aisément les écharpes tricolores des maires des 11 communes concernées par cette école intercommunale, avec celle de Michel Grégoire également député, Conseiller Général et président du SIVOS.

La date de cette manifestation n'avait pas été choisie au hasard. Cette semaine en effet risque d'être décisive pour l'école du Buis puisque c'est vendredi après midi que se réunira à Valence le C.T.P. C'est ce Comité Technique Paritaire, présidé par l'inspecteur d'Académie, qui sera notamment chargé de rendre définitives les propositions de carte scolaire départementale d'ouverture et de fermeture de classes. Or de fermeture à Buis on ne veut pas en entendre parler et l'on souhaite que cela se sache.

La présidente du Conseil Local de parents d'élèves de l'école du Buis, Dominique Grobb ne manque pas, il est vrai, d'arguments : " On ne peut pas nier qu'il y aura effectivement une baisse d'effectif ponctuelle l'année prochaine, déclare-t-elle, mais cette baisse est évidemment temporaire et le mouvement démographique général dans la région montre une augmentation continue de la population dans les 11 communes concernées qui sont passées de 3100 à 3500 habitants durant ces 10 dernières années. En passant de 8 à 7 classes l'effectif moyen de chaque classe sera porté à 26,85 élèves par classe ce qui, compte tenu de la spécificité de l'école signifie qu'il y aura nécessairement des classes de 30 élèves. Ce seuil de fermeture de classe est un véritable non sens dans une école particulièrement active (organisation annuelle de voyages, ouverture sur l'extérieur, activités sportives et culturelles multiples, horaires aménagés du mercredi, CATE - Contrat d'Aménagement du Temps Educatif, etc.) "

Les enseignants de leur coté ne cachent pas qu'une telle mesure remettra inévitablement en cause certaines aspects parmi les plus novateurs du fonctionnement de l'école. Jean Pierre Buix, maire du chef lieu de canton et également instituteur dans cette école primaire, insiste quant à lui sur " la chance que constitue cette baisse d'effectif temporaire à l'école du Buis, qui permettrait au contraire de faire du bon boulot, avec des enfants dont on voit chaque jour à quel point l'école primaire constitue pour eux un rempart contre ces maux de notre société que sont l'exclusion, la précarité, la délinquance, la violence, la drogue qui les menacent… ". Dans une formule lapidaire qui n'appartient qu'à lui il devait résumer son point de vue en s'adressant au ministre Claude Allègre sur ce ton : " Vous voulez dégraisser le mammouth et vous agressez ses enfants… "

Enfin Michel Grégoire, prenant la parole autant comme député que comme père d'enfants scolarisés à l'école du Buis, devait clairement se déclarer opposé au gel de création de poste dans l'Education Nationale. Informant qu'il avait rendez-vous aujourd'hui même lundi à Valence avec l'inspection d'Académie et dans le courant de la semaine à Paris au ministère, il précisait clairement que sur un tel sujet il n'était pas prêt à toujours respecter la discipline de groupe inhérente à ses fonctions parlementaires.

Il est vrai que les buxois sont maintenant très mobilisés pour garder leur nombre de classes inchangé à l'exemple de ces dizaines d'enfants qui, en tête du cortège, scandaient inlassablement " 8 classes l'an prochain, pas une de moins ! ". Les parents d'élèves ont prévu l'occupation de l'école à partir du mardi 14 mars à 08h30 pour une durée indéterminée. Ils ont prévu également de se rendre en délégation avec le maire mercredi à Valence pour rencontrer eux aussi l'inspection d'Académie. Enfin jeudi et vendredi l'école sera en grève, le jeudi dans le cadre d'une grève nationale à l'appel de tous les syndicats d'enseignants et vendredi dans le cadre d'une grève départementale le jour où le CTE se réunit pour discuter de cette carte scolaire si contestée.

Alain Bosmans