La "porte" des Baronnies
C’est un village que l’on a tendance à traverser trop vite et dont on ne conserve habituellement que la vision fugitive d’un gros donjon perché sur un rocher ou celle d’un pont flanqué d’une fontaine à un bout et d’un beffroi à l’autre. Pourtant Mollans mérite un arrêt, une visite attentive, en s’attardant dans la partie haute, incroyable dédale fleuri où d'étroites ruelles se faufilent entre des jardinets perchés.
Ce Mollans, calme, amical, fleuri, empanaché d’un solide château aussi rassurant que carré, est bien différent du Mollans guerrier des siècles passés quand l’Ouvèze était une route naturelle dont Mollans était la « Porte » qu’il convenait de garder pour préserver la tranquillité à l’intérieur des Baronnies. De par sa position géographique, Mollans a toujours joué le rôle d’une authentique « Frontière » entre le Comtat Venaissin et le Dauphiné, entre la riche plaine et la montagne sèche. Dès le Moyen Age, Mollans est une place-forte importante, ville fortifiée, avec deux châteaux, trois tours et un pont levis, l’ensemble protégé par une enceinte. Des défenses musclées qui témoignent d’une histoire mouvementée durant les guerres de religion.
Le village est adossé confortablement au relief des Baronnies qui le protège du Mistral et regarde à l’ouest les plaines du Comtat. Pays de vignes et de cultures maraîchères dans les vallées, c’est une terre d’oliviers, d’arbres fruitiers, de tilleul et de lavande que l’on découvre rapidement sur ses contreforts. S’étendant sur les deux rives de l’Ouvèze son pont médiéval peut être regardé comme un trait d’union entre ces deux cultures. Village à vocation agricole donc, mais aussi centre important de commerce et d’échanges comme en témoigne la grande foire annuelle de la Saint Marc au cours de laquelle dés le moyen âge et jusqu’au 19 ème siècle se vendaient les agneaux du haut-pays. Mollans fut également longtemps une cité industrieuse avec ses nombreux moulinages (de blé et d’huile), son élevage de vers à soie (l’un des plus anciens et des plus importants du canton) et ses nombreux commerces de la "Grande rue". Longtemps péage entre Comtat et Dauphiné, encore aujourd’hui frontière entre les départements de la Drôme et du Vaucluse, entre les régions de Rhône-Alpes et de la P.A.C.A., Mollans a toujours su profiter de cette situation pour enrichir son patrimoine et assurer une économie de tous temps prospère. Aujourd'hui,une cinquantaine de commercants, artisans et entrepreneurs maintiennent un ensemble d'activités dont le dynamisme économique est particulièrement florissant durant la période estivale.
La commune continue en effet de tirer
l’essentiel de ses richesses de l’agriculture et principalement de la culture
de la vigne et de la production de vin en appellation Contrôlée
« Côte du Rhône ». Citons également une culture
de terroir : Celle du « Coco de Mollans », un haricot blanc au goût
subtil et savoureux auquel les habitants aiment à s’identifier non sans
humour au sein d’une confrérie du même nom... ! (
« un syndicat
pour les cocos ») . On notera également
la présence sur la commune d'un luthier de réputation internationale.
("Poête, prend
ton luth..." ).
Des aménagements récents entre Ouvèze et Toulourenc ont
permis la création de nouveaux espaces résidentiels et hôteliers
entraînant le développement d’activités touristiques dont
l’importance en terme de revenus (sinon d’emplois) est loin d’être négligeable.
Regroupant plus de 800 habitants, « La porte des Baronnies » à
retrouvé aujourd’hui la population qu’elle avait au début du siècle,
un chiffre qui fait plus que doubler chaque année en période estivale.
La ville Basse.
Sur la rive gauche de l’Ouvèze on admirera la superbe fontaine dite « Au Dauphin », l’animal dont elle est surmontée symbolise le passage entre les deux anciennes provinces : La Provence et le Dauphiné. Construite en 1713, c’est la première à couler à Mollans car le village ne possède pas de sources et l’eau est amenée par tout un système de canaux d’irrigation. Il faudra même attendre la fin du 19ème siècle pour que les autres fontaines soient construites : treize au total. Le lavoir couvert situé derrière la fontaine au Dauphin date du milieu du 19ème siècle, on remarquera l’élégance de ses sept arcades. L’ensemble est classé monument historique.
Le pont, sans doute d’époque
médiévale, a été élargi en 1851, puis prolongé
en 1906 par un pont métallique pour permettre le passage de la voie ferrée.
A l’origine, il était flanqué d’un dispositif de sécurité
constitué de trois tours rondes dont il ne subsiste qu’une qui servira
de base à l’érection d’un beffroi au début du 18 ème
siècle. Récemment restauré ( «
La tour prend garde ») la Tour de
l’Horloge est surmontée d’un campanile, et porte simultanément
un carillon, une horloge à aiguille unique et un cadran solaire.
Face au beffroi, la minuscule chapelle Notre-Dame de Compassion a la particularité d’être totalement en encorbellement au-dessus du lit de l’Ouvèze. C’est un édifice qui ne date que de 1851, mais marque un lieu de culte beaucoup plus ancien.
La ville haute
Groupé au pied d’un château
dont il ne reste que la partie basse du donjon et quelques-unes de ses défenses,
la vieille ville de Mollans recèle dans ses rues étroites un ensemble
médiéval qui sert souvent de théâtre aux manifestations
festives et culturelles. La plus importante consiste à transformer les
rues du vieux village en un décor moyen-ageux qui accueille une gigantesque
exposition de peintures artistiques le 3 ème week-end de juillet .("Les
Peintres dans la rue" en 1997 et en
1998). Différents témoins architecturaux rehaussent l’intérêt
d’une visite qu’il ne faut envisager de faire qu’à pied. On prendra le
temps de flâner dans les ruelles escarpées et fleuries dont les
habitants ont eu le goût de récupérer de nombreuses parcelles
ruinées et inoccupées pour les convertir en jardin.
On arrive ainsi tôt ou
tard au pied des restes du puissant château fort que les comtes de Mévouillon
avaient fait construire au 12ème siècle. Aujourd’hui le château
est propriété privée, et on ne peut admirer que d’en-dessous
son aspect simple, carré et trapu mariant une partie médiévale
avec une partie Renaissance.
En contrebas du château on découvrira l’église Saint-Marcel construite pendant la période révolutionnaire et dont l’aspect extérieur peu remarquable s’oppose au véritable musée d’art sacré (essentiellement du 19ème siècle) que contient l’intérieur. Depuis la grille du portail dont les battants restent désormais ouverts tout l’été, on admirera le mobilier et la chaire en noyer ainsi que le chœur largement décoré de grandes toiles religieuses avec des débauches de marbres et de guirlandes en trompe-l’œil. L’autel, en marbre polychrome de Carrare, récemment restauré (voir l’article du D.L. « l’autel est de retour ») est un des plus beaux spécimens du style baroque flamboyant du milieu du 18ème siècle.
Sortant de l’église, on descendra au niveau de la ruelle inférieure
pour trouver une petite place charmante depuis laquelle on découvre un
lavoir, niché en souterrain sous le parvis, et une maison perchée
sur une double arcade enjambant le passage des rues. Ce bâtiment, surmonté
d’un petit clocheton est l’ancienne chapelle des Pénitents. Construite
au milieu du 17ème siècle, elle abrite aujourd’hui une association
culturelle villageoise ("Visites réelles
ou Virtuelles"), garante des archives du
village ("Journée
du Patrimoine") ainsi qu'une bibliothèque associative («
Interdit aux parents »). On sortira
du village en empruntant la robuste porte fortifiée qui défendait
l’accès Nord du village côté Baronnies.
Bibliographie :
* Patrick
Ollivier : "Les Baronnies - Mode d’emploi d’un fragment de Paradis". Edition
Aubanel à Avignon.
* Bernard Laget : « La vallée de l’Ouvèze dans les
Baronnies à travers les cartes postales -1900/1920 » . Buis
les Baronnies .
* Guy Barruol : « Les Baronnies au Moyen Age » . Publication
des Alpes de Lumières - 2 ème semestre 1997.
* Jean François Colonat : Site Web "Le garde Notes Baronniard" :
http://perso.wanadoo.fr/gardenotes/